Par Sadock MATHE SEMENGO

Depuis plus de trois décennies, la région du Kivu, en République démocratique du Congo(RDC), connaît de graves crises sécuritaires. Cette situation a entrainé d’énormes conséquences, notamment les pertes en vies humaines mais aussi entraver le développement de la région de grands-lacs. Afin de pallier ce fléau, le gouvernement congolais a conclu, en date du 27 juin 2025, un accord de Paix avec le Rwanda. Sous la médiation Américaine, Kinshasa a saisi l’opportunité qu’offre la diplomatie Trumpienne pour résoudre d’une manière durable les conflits dans la partie Est de la RDC. Il convient de mentionner que la signature de cet accord intervient dans un environnement complexe.En effet, entre les mois de janvier et février 2025, il y a eu une forte réapparition de la rébellion AFC/M23 qui contrôle les villes de Goma, Bukavu, ainsi qu’ une bonne partie des régions minières du Kivu. Dans cette complexité géopolitique et économique instable, nous analysons les opportunités économiques qu’offre cet accord pour la RDC et le Rwanda. Pour ce faire, cette analyse s’appuie sur l’usage de  l’outil SWOT(forces, faiblesses, opportunités et menaces) appliqué aux deux Etats. Plus précisément,  les éléments d’analyse portent sur  la cogestion des parcs nationaux, la valorisation des minerais et l’exploitation des ressources du lac Kivu. S’agissant de  la RDC, seules les ressources de la région du kivu feront l’objet de l’analyse. Ainsi, nous aborderons  ces enjeux en prenant en compte les principaux axes d’analyse, notamment (a) le contenu et les ambitions de l’accord, (b) l’intelligence économique comme un nouveau champ de bataille pour la coopération régionale , (c et d) Analyse SWOT de la RDC et du Rwanda, et (e) la conclusion.

a) Contenu et ambitions de l’accord

L’accord de paix entre la RDC et le Rwanda contient plusieurs mécanismes visant une stabilité régionale et une coopération économique pour le développement de la région des grands-lacs. Ces mécanismes comprennent certains aspects, tels que le respect de l’intégrité territoriale de la RDC, le désarmement des troupes étrangères sur le sol congolais, etc. Dans ce contexte, nous nous sommes intéressés uniquement au cadre d’intégration économique régionale, mentionné dans l’accord. A travers ce cadre, Kinshasa et Kigali se mettent d’accord pour une coopération bilatérale axée sur la cogestion des parcs nationaux, le développement de l’énergie hydroélectrique, le dérisquage de la chaîne d’approvisionnement en minerais et la l’exploitation commune des ressources du lac Kivu. En sus, ces deux parties prenantes choisissent le gouvernement et les investisseurs américains comme principaux partenaires. Autrement dit, dans cet accord le gouvernement américain s’est retrouvé dans une double posture, où il est à la fois médiateur et bénéficiaire direct de l’accord. Dans une logique mondiale de recherche des matériaux critiques, il est donc de nature analytique de se questionner sur “quelle région de la RDC est à l’origine du dudit accord?” 

a.1) Le Kivu, une région aux ressources stratégiques abondantes

Lorsque l’on s’intéresse à cette question de la cogestion des ressources entre la RDC et le Rwanda, il est important de comprendre en amont la position géographique du Rwanda par rapport à la RDC. La RDC est un pays immense, frontalier de neuf autres pays africains. Le Rwanda est l’un de ses pays frontaliers situés dans sa partie orientale. Concrètement, le frontière entre la RDC et le Rwanda se situe au niveau des provinces du Nord et Sud-Kivu. 

Ceci dit, lorsque l’accord indique la gestion commune des ressources(parcs nationaux, lac Kivu, minerais), il s’agit à grande partie des ressources du Kivu et celles du Rwanda. Au-delà des gisements miniers connus par le grand public, cette zone renferme également une faune et une flore attrayante que l’on retrouve dans les parcs nationaux comme Virunga, Kahuzi-Biega, dans la réserve naturelle d’Itombwe, et la réserve intégrale du Mont Huyo en RDC.

Figure 1: Localisation des parcs nationaux de la RDC

Source: WDPA

Au Rwanda voisin, l’on retrouve également quelques parcs nationaux. Parmi lesquels, nous citons le parc national les Volcans, le parc national de Nyungwe et le parc national de l’Akagera. Ces parcs contiennent une faune rare et une flore protégée. Ainsi,ces parcs constituent un écosystème économique important pour le Rwanda. Nous verrons plus tard l’ensemble des business écotouristiques développés autour de cet écosystème attractif.

Figure 2: les parcs nationaux du Rwanda

source:Mistertravel.news

Pour ces deux pays, les parcs cités constituent un environnement économique de grande valeur . Au stade actuel, d’énormes avancées dans le cadre du business écotouristique s’observent plutôt du côté du Rwanda. Du côté de la RDC, cette opportunité reste encore insignifiante. La raison principale de cette situation est liée à une fragilité sécuritaire que l’on observe depuis maintenant plusieurs années dans la région du Kivu. Hormis cet aspect centré sur la faune et la flore, la RDC et le Rwanda détiennent les matériaux critiques dont le monde a encore besoin pour son développement multisectoriel. Ces minéraux précieux se localisent à grande partie dans la région du Kivu en RDC. C’est donc ces gisements du Kivu et ceux du Rwanda que nous aborderons via l’outil SWOT pour éclairer nos analyses.

Au-delà de la problématique de recherche de la la paix dans la région de grands-lacs, il est prévisible de comprendre qu’il s’agit d’un accord présentant des enjeux économiques majeurs pour les parties prenantes.  Dans cette optique , il est nécessaire de se questionner “les deux pays avaient-ils prévu les mécanismes d’anticipation de cette opportunité économique?”.

b) L’intelligence économique, un nouveau champ de bataille pour la coopération régionale entre la RDC et le Rwanda

Comme nous l’avons annoncé, l’accord de paix entre la RDC et le Rwanda mentionne la cogestion des parcs nationaux, le développement d’infrastructures pour l’énergie hydroélectrique, le dérisquage de la chaîne de valeur des matières premières, mais aussi l’exploitation commune des ressources halieutiques et gazières que l’on trouve dans le lac Kivu. Avant d’aller plus loin, il convient de définir le concept “cogestion ou co-gouvernance”. D’après le centre national des ressources textuelles et lexicales(CNRTL), la co-gestion est une gestion en commun d’un organisme ou d’une ressource entre différents membres qui le composent. S’agissant de l’accord de paix entre la RDC et le Rwanda, cette cogestion s’inscrit dans le cadre d’une relation bilatérale. Or, si l’on considère le fameux adage de Charles de Gaulle “les Etats n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts”, l’on comprend que parmi les parties prenantes, la nation ayant anticipé cette opportunité sera celle qui en tirera le plus d’avantages.

Dans cette perspective, une maîtrise des pratiques d’intelligence économique(IE) paraît dès lors comme un enjeu vital pour ces deux pays. Autrement dit, comprendre le rôle que joue l’IE dans cet accord devient indispensable. Pour éclairer cette notion, nous avons retenu la définition d’Alain Juillet, qui définit l’intelligence économique comme la maîtrise d’informations stratégiques utiles aux acteurs économiques(Etats, institutions, entreprises). Plus concrètement, l’IE comprend les pratiques comme la veille stratégique, la lutte contre l’espionnage économique, l’influence, etc. En outre, en abordant la question de co-gouvernance des ressources entre la RDC et le Rwanda, nous trouvons utile de préciser qu’une bonne partie de ces matières premières critiques se trouvent dans le Kivu. Compte tenu de cette richesse, il devient  capitale de disposer d’une connaissance globale des pratiques de l’IE, notamment dans la cartographie précise des minerais du Kivu, la collecte d’informations stratégiques, mais également le développement des pratiques d’influence visant à façonner une nouvelle perception internationale autour de la région du Kivu. Néanmoins, à l’ère actuelle, Kinshasa semble ne pas disposer d’organes institutionnels permettant une maîtrise complète des données stratégiques dans la région du Kivu.    

La présence dans cette région de la rébellion AFC/M23, est un facteur majeur qui complexifie davantage la perte de souveraineté économique et informationnelle pour le gouvernement congolais dans cette partie du pays.  Dans ce domaine de maîtrise de l’information stratégique, il convient de souligner que le Rwanda a enregistré quelques prouesses en matière d’intelligence économique(IE). A titre illustratif, le Rwanda a mis en place une structure dédiée à l’IE. c’est l’agence Rwanda development board(RDB). Avec à sa tête Clare Akamanzi, young leader 2012, ce cabinet a permis au pays de développer des nombreux projets innovants dans le domaine des TIC(technologies de l’information et de la communication), mais également le développement du soft power rwandais en matérialisant le programme “Visit Rwanda”. Pour bien comprendre ces enjeux, nous vous proposons une lecture éclairée dans cette analyse SWOT.

C) Analyse SWOT de l’accord de paix en abordant l’aspect de la cogestion pour la RDC

1) les atouts de la RDC

La RDC est un pays extrêmement riche en minéraux précieux. Cette abondance lui confère la qualification d’un pays à scandale géologique. Selon le ministère du plan, les ressources encore inexploitées de la RDC sont estimées à 24 billions de dollars (2009). En omettant les minéraux précieux que l’on rencontre au niveau d’autres provinces, voici une lecture listée des minerais de la région du kivu(coloré en jaune) . 

Figure 3: Liste des minerais de la région du Kivu

Source: CTCPM

Au-delà des ressources minières, les parties prenantes vont également soutenir les initiatives d’exploitation commune des ressources du lac Kivu. Géographiquement, ce lac constitue la frontière naturelle entre la RDC et le Rwanda. En RDC, ce lac relie deux grandes villes, entre autres la ville de Bukavu et celle de Goma. Ensuite, il facilite une liaison naturelle de ces villes congolaises précitées, avec les villes Rwandaise de Gisenyi, Cyangugu, et Kibuye. Ce lac représente un potentiel économique important pour ces deux pays. Avec une superficie de 2 700 Km2, il constitue un réservoir important pour l’exploitation des ressources halieutiques et gazières qui s’y trouvent.

Figure 4: Localisation du lac Kivu

Source: Courrier international

Le Kivu, c’est aussi la région qui contient une flore et une faune idéale pour le développement d’un écosystème économique basé sur le tourisme. Cette région renferme des espaces protégés(parcs nationaux), qui hébergent les espèces animales et végétales en voie de disparition dans plusieurs endroits du Monde. Parmi ces espèces, citons le cas des buffles, gorilles, lions, etc. Quant à la gestion, ces endroits sont gérés par  l’institut congolais de conservation de la nature(ICCN).

2. Les vulnérabilités de la RDC

Malgré ces énormes ressources, la RDC présente plusieurs défis. Sur le plan politique, le pays connaît une gabegie dans la gestion étatique. Ce phénomène se manifeste par un leadership faible, une mauvaise gouvernance, et un taux élevé de pauvreté(72,9% selon la Banque mondiale). Sur le plan sécuritaire, la RDC est classée parmi les ” failed states”, les états faillis. Un contexte expliqué par une perte de souveraineté dans plusieurs régions du pays, et dans le cadre de cette analyse, cette perte de souveraineté dans le kivu accentue davantage les vulnérabilités de la RDC. Sans citer le contexte conflictuel en RDC, le pays est aussi à la merci d’une guerre informationnelle. Cette dernière est la plus grave car ses conséquences ont une influence négative sur l’investissement dans le secteur minier, surtout dans la région du Kivu. A titre d’exemple, les minerais du Kivu ont la connotation “des minerais du sang” sur le marché international. Et donc, cette nomenclature constitue le premier facteur de réticence pour les investisseurs miniers.

3. Quid d’opportunités pour la RDC

En signant cet accord, Kinshasa voit en premier lieu une fenêtre d’opportunité pour résoudre d’une manière durable les tensions qui l’oppose à son voisin Rwandais. Il s’agit de se servir de la diplomatie Trumpienne pour obtenir la paix dans la partie orientale de la RDC. Cette nouvelle diplomatie Washingtonienne  se résume par le  diptyque “faire la paix , en échange des matières premières”. L’exemple Ukrainien de l’accord avec l’Amérique sur l’exploitation des terres rares ukrainiennes, peut-être considéré comme le premier cas d’école et la première victoire de ce modèle diplomatique. En second lieu, la RDC a une volonté de se servir de ce contexte pour relancer les initiatives de développement multisectoriel dans la région du Kivu. Dans cette logique, cet accord s’inscrit dans une perspective à positionner la RDC comme territoire stratégique, offrant une climat prometteur pour les investisseurs américains.

Enfin, l’accord est considéré comme un levier  majeur pour le développement de la région des grands-lacs. C’est-à-dire la mutualisation des compétences, des ressources et le développement d’initiatives communes entre la RDC et le Rwanda, en excluant toute logique de confrontation régionale.

4. Les éventuels risques pour la RDC

Comme d’autres pays du monde, les pays africains ont besoin d’alliances stratégiques pour accroître, protéger ou sécuriser leurs intérêts vitaux et stratégiques. Toutefois, le cas de la RDC exige une technicité et une rigueur politique dans la signature d’alliances. Le cas inverse peut conduire le pays à une perte de souveraineté sur ses immenses richesses, et en particulier celles de la région du Kivu. En signant cet accord de paix, les deux pays ont ignoré un nouvel acteur majeur pour la réussite de cet accord. Il s’agit de la rébellion AFC/M23. Au niveau de l’accord, quelques initiatives pour désarmer ou réintégrer volontairement certains membres de cette rébellion, ont été évoquées. Par contre, ces initiatives ne sont autres que la poursuite des négociations menées sous le lead du Qatar ou la confiance aux initiatives de l’Union africaine(UA). Depuis  le début du conflit, ces dernières ont montré leurs limites, et aucune issue n’a été trouvée grâce à ces mécanismes précités. L’occupation par cette rébellion d’une grande partie de la région du Kivu, est à présent un enjeu majeur qui rebat les cartes à moyen et à long terme tant pour la RDC que pour le Rwanda. De plus, en choisissant les Etats Unis comme principal investisseur, la RDC peut se retrouver dans un risque de dépendance stratégique envers son voisin, le Rwanda. Dans sa stratégie d’intelligence économique, il est prévisible d’annoncer une probable anticipation de cette opportunité en amont par le Rwanda. En effet, parmi les enjeux évoqués, nous avons cité le dérisquage des matières premières et une cogestion des parcs nationaux. Avec l’agence Rwanda development board(RDB), le Rwanda a officiellement annoncé d’avoir certifié l’entièreté de son exportation minière aux standards anglais ISTCI(International Tin supply chain initiative). De plus, l’agence RDB a développé tout un écosystème économique dans le domaine touristique, centré sur l’écotourisme dans les parcs nationaux du Rwanda. Ces initiatives ont connu un succès, et sont aujourd’hui propulsées par le soft power rwandais conçu autour du programme “Visit Rwanda”.

d) Analyse SWOT de l’accord de paix en abordant l’aspect de la cogestion pour le Rwanda

1. les atouts du Rwanda

En prenant cet aspect lié à une gestion commune des ressources, les avantages du Rwanda se résument au niveau de trois secteurs d’actions stratégiques. En premier lieu, l’on retrouve le secteur minier. Dans l’exportation minière, le dérisquage de la chaîne de valeur sur l’exportation des minerais du Rwanda, est entièrement certifié aux standards anglais ISTCI(International Tin supply chain initiative) . Cette certification positionne le Rwanda comme un acteur fiable, avec pour conséquence, la captation d’investissements publics et privés. Le tourisme se positionne en deuxième lieu. En effet, le Rwanda a fait du tourisme la première source des richesses du pays. Grâce aux travaux de l’agence RDB, le pays a mis en place un plan stratégique pour développer le secteur écotouristique. La principale niche pour cet écotourisme est le parc national les Volcans. En Afrique, ce parc constitue un lieu incontournable pour les écotouristes.  Il contient 35% de la population mondiale des gorilles de montagne. Pour l’attractivité territoriale, des infrastructures hôtelières de luxe ont été construites à côté de ce parc. C’est le cas des hôtels comme “One&Only Gorilla’s Nest. 

En dernier lieu, Kigali a construit une stratégie d’influence efficace. Celle-ci est fondée sur un principe de diplomatie victimaire. Le Rwanda utilise son passé horrible pour la réussite de ses actions d’influence. Il s’agit de la construction du narratif autour du génocide Rwandais. Ce narratif victimaire est bien conçu par l’agence RDB qui permet au Rwanda de réussir ces rouages diplomatiques. Pour rappel, le soft power rwandais est visiblement connu via le programme “visit Rwanda”. Ce programme permet au Rwanda de réussir ses politiques d’attractivités, et de capter les investissements étrangers. Dans le secteur minier, le Rwanda est l’un des producteurs mondiaux de 3T( le tungstène, la cassitérite et le tantale). 

2. Les limites et risques  pour le Rwanda

Depuis l’année 2000 jusqu’à aujourd’hui, le Rwanda est dirigé par le président Paul Kagame. Cette présence d’un leader à la gouvernance d’un Etat depuis plusieurs années, peut être analysée des différentes facettes. Tout d’abord par ceux qui considèrent cette démarche  comme vecteur de développement. Dans ce cadre, il est question de se positionner sur la réussite des programmes politiques en se basant sur le développement d’une vision stratégique qui s’inscrit sur les temps longs. En revanche, cette perception a des conséquences sur l’image internationale des leaders politiques. En ce qui concerne le Rwanda, le régime de Kigali est qualifié de régime autoritaire. Malgré l’organisation des différentes élections justifiant une démocratie, le gouvernement Rwandais reste sous la connotation d’une “démocrature”. 

Sur l’échiquier international, le Rwanda est vu comme le pays déstabilisateur de la RDC. Cette position fragilise l’image du Rwanda sur la scène internationale, et peut avoir des conséquences à long terme sur l’économie minière du Rwanda, étant donné que certains investisseurs pourraient considérer les matières premières en provence du Rwanda comme  issues des“ minerais du sang” et se tourner vers d’autres marchés miniers.

Enfin, cet accord représente un risque majeur de dépendance de l’économie Rwandaise à celle de la RDC. Ce qui implique que  toute rupture de l’accord par la partie congolaise risquerait de provoquer une instabilité économique du Rwanda.

3. Les fenêtres d’opportunités

A partir de cet accord, le Rwanda a une possibilité de développer davantage son écosystème écotouristique et son économie minière. Dans une logique de coopération et de mutualisation des compétences, le Rwanda pourrait tirer parti de cet accord en prenant une longueur d’avance sur son voisin, la RDC, en fournissant les données de benchmarking utiles au développement d’initiatives similaires dans la partie congolaise. Par ailleurs, dans  la bataille du narratif, cet accord offre au Rwanda une possibilité de corriger les perceptions négatives associées à son image( pays déstabilisateur et agresseur de la RDC). Pour une lecture en synthèse de ces enjeux, le tableau ci-dessous présente une analyse  SWOT simplifiée. 

Tableau de synthèse de la l’analyse SWOT

Domaines ciblésdétail de l’analyse Sources
Parcs nationauxRDC: Pays avec une biodiversité exceptionnelle( parcs de Virunga, Kahuzi-Biega, etc),parcs classés patrimoines mondiales de l’humanité par l’UNESCO
*Défis: La RDC(Kivu) souffre d’une insécurité chronique(plusieurs groupes armés), le pays connaît une gouvernance environnementale faible avec un secteur écotouristique marginalisé faute d’infrastructures et investissements
RWANDA: Présence d’une biodiversité attrayante(parcs les Volcan, Nyungwe), avec un fort développement de l’écotourisme qui est propulsé par le programme “Visit Rwanda
*Défis: Risque de dépendance au secteur touristique, croissance démographique élevée avec moins de ressources( facteur possible de résistance à l’extension des projets dans les aires protégées)
Zones de coopération possible RDC-RWANDA: -Co-gestion des parcs nationaux, développement du corridor économique régional entre le Rwanda-RDC via le Kivu, -Développement des mégaprojets touristiques  
-Parcs et réserves de la RDC(IUCN Papaco)- Vue d’ensemble RDC(world bank)-Réserves protégées au Rwanda(https://www.parks.it/world/RW/Findex.html
Minéraux précieuxRDC: pays avec des réserves majeurs des matériaux critiques(coltan, or, lithium, diamant, etc)Défis:-faible traçabilité avec un indice de corruption remarquable
RWANDA: Présence des minéraux précieux, les plus connus sont les 3T(Tantale, Tungstène, cassitérite), pays connu pour une bonne traçabilité avec une certification de l’exportation minière aux standards(ISTCI), mais aussi un mémorandum d’approvisionnement durable des matières premières critiques à l’Union Européenne
*Défis:- Accusation de trafic des minerais “les minerais du sang” en provenance de la RDC(Kivu) 
Zones possibles pour une coopération:- Accord de paix RDC-RWANDA avec pour but de créer une zone économique majeure (collaboration avec les Etats-Unis= Principaux investisseurs)
-les mines en RDC(investirdc-ministère du plan)-les mines au Rwanda(Ambassade de la France au Rwanda)
Intelligence économiqueRDC: *Défis: pays avec une faible culture de l’intelligence économique(avec d’une coordination nationale, provinciale, urbaine… de l’information stratégique)-Pays à la mercie d’une guerre de l’information( minerais du sang, pays le plus corrompu, gouvernement qui prône le népotisme, etc)
RWANDA: Pays avec une maîtrise de l’influence”programme visit Rwanda” et une bonne mise en place des pratiques de l’intelligence économique(grâce aux actions de l’agence Rwanda Development Board)
Défis: Stratégie d’influence basée sur l’aspect victimaine “victimaire=génocide Rwanda”(potentiel risque de desinformation pour les connaisseurs)
-Conflits en RDC, guerre informationnelle avec le Rwanda(EGE)-Politiques d’influence du Rwanda(EGE)
Exploitation des ressources du Lac KivuRDC&RWANDA: Zones de coopération:
Potentiel énergétique à exploiter+la valorisation du gaz méthane
-Accord de paix RDC-RWANDA(Ambassade des Etats-Unis en RDC)

Tableau1: synthèse des données d’analyse SWOT

e) Conclusion

L’accord de paix conclu entre la RDC et le Rwanda constitue une initiative capitale pouvant participer à la redéfinition des rapports bilatéraux dans la région des grands-lacs. En priorisant une coopération basée sur la cogestion des parcs nationaux, le dérisquage de la chaîne de valeur sur les minerais et l’exploitation commune des ressources du lac Kivu, les deux Etats cherchent à transformer un espace des conflits en un cadre de coopération économique. Dans cette logique, l’intelligence économique(IE) paraît comme un instrument incontournable de souveraineté et de compétitivité pouvant permettre à la RDC d’anticiper les rapports de force, et la maîtrise des données stratégiques. Ceci permettrait à la RDC de protéger ses intérêts dans cet environnement régional(le Kivu), souvent instable. Afin de tirer pleinement parti de l’accord, deux recommandations seraient envisageables,notamment (1) la création d’une cellule nationale d’intelligence économique centrée sur les ressources du Kivu, et (2) une mise en place d’un pôle public-privé pour la transformation minière afin de réduire la dépendance à l’exportation brute. La réussite de cet accord dépendra d’une prise en compte de plusieurs facteurs, notamment la stabilité des régions sous l’influence du M23, l’intégration des communautés locales dans la gestion économique, le strict respect d’une gouvernance transparente des ressources, ainsi qu’une importance nationale de développement des compétences en intelligence économique. En définitive, cet accord apparaît comme une opportunité pour pacifier la région du Kivu. Cependant, une interrogation majeure reste sans réponse: “la diplomatie Trumpienne, fondée sur le principe d’exploitation des ressources en échange de la paix, permettra-t-elle à la RDC de consolider sa souveraineté économique et minière ou ne risque-t-elle pas, au contraire, de placer la RDC dans une forme de dépendance stratégique?”

Références

Accord de paix RDC-Rwanda : Qu’en est-il ? (2025, juillet 2). IRIS. https://www.iris-france.org/accord-de-paix-rdc-rwanda-quen-est-il/

Agence Nationale pour la Promotion des Investissements. (s. d.). Consulté le 20 octobre 2025, à l’adresse https://www.investindrc.cd/fr/spip.php?article10

Bank, A. D. (2022, avril 4). Assessment of the Potential of Development Mineral Value Chains to Support Rwanda’s Economic Development [Text]. African Development Bank Group; African Development Bank Group. https://www.afdb.org/en/documents/assessment-potential-development-mineral-value-chains-support-rwandas-economic-development

Contexte de guerre économique : Le cas du Rwanda. (2023, septembre 20). Ecole de Guerre Economique. https://www.ege.fr/infoguerre/contexte-de-guerre-economique-le-cas-du-rwanda

Kinshasa, U. S. E. (2025, juin 27). Accord de Paix entre La République Démocratique du Congo et La République Du Rwanda. Ambassade des Etats-Unis en République démocratique du Congo. https://cd.usembassy.gov/fr/accord-de-paix-entre-la-republique-democratique-du-congo-et-la-republique-du-rwanda/

Les enjeux d’influence autour du processus de certification dans l’extraction minière des 3T. (2024, juillet 15). Ecole de Guerre Economique. https://www.ege.fr/infoguerre/les-enjeux-dinfluence-autour-du-processus-de-certification-dans-lextraction-miniere-des-3t

L’UE et le Rwanda signent un protocole d’accord sur les chaînes de valeur durables pour les matières premières—Représentation au Luxembourg. (s. d.). Consulté le 20 octobre 2025, à l’adresse https://luxembourg.representation.ec.europa.eu/actualites-et-evenements/actualites/eu-und-ruanda-unterzeichnen-eine-vereinbarung-uber-wertschopfungsketten-fur-nachhaltige-rohstoffe-2024-02-19_fr

Parc national des Virunga—UNESCO World Heritage Centre. (s. d.). Consulté 20 octobre 2025, à l’adresse https://whc.unesco.org/fr/list/63/

Parks.it—Parcs, Réserves et autres Espaces Protégés au Rwanda. (s. d.). Consulté 20 octobre 2025, à l’adresse https://www.parks.it/world/RW/Findex.html

République démocratique du Congo—Vue d’ensemble. (s. d.). [Text/HTML]. World Bank. Consulté le 20 octobre 2025, à l’adresse https://www.banquemondiale.org/fr/country/drc/overview

Rwanda. (2013, novembre 15). IMPACT. https://impacttransform.org/fr/par-pays/rwanda/

Sara,+33953-90243-1-CE.pdf. (s. d.). Consulté le 20 octobre 2025, à l’adresse https://revues.imist.ma/plugins/generic/pdfJsViewer/pdf.js/web/viewer.html?file=https%3A%2F%2Frevues.imist.ma%2Findex.php%2FREGS%2Farticle%2Fdownload%2F33953%2F17495%2F90244

Voulkovski, H. (2024, novembre 20). Rwanda : La révolution minière. Conflits : Revue de Géopolitique. https://www.revueconflits.com/rwanda-la-revolution-miniere-entre-industrialisation-transparence-et-inclusion/

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *